Taxonomie : le gaz classé en énergie verte par la Commission européenne

Partager

 

Ce 2 février, la Commission européenne a « approuvé en principe » l’« acte délégué complémentaire sur le climat » concernant la place du gaz et du nucléaire dans le dispositif de classification des activités climato-compatibles qui pourrait entrer en vigueur au 1er janvier 2023. Faisant suite au premier acte délégué du 31 décembre, dont les critères d’inclusion du nucléaire et du gaz dans la taxonomie verte avaient été repoussés en raison de vifs désaccords entre les États membres, ce nouvel acte inclut « des activités spécifiques dans le domaine de l’énergie nucléaire et gazière dans la liste des activités économiques couvertes par la taxonomie de l’UE », et classe le gaz et le nucléaire au rang des « énergies de transition » éligibles à la finance verte… sous « conditions strictes ». Explications.

 

Le gaz et le nucléaire, « énergies de transition »

« Pour atteindre la neutralité climatique d’ici à 2050, l’UE a besoin d’un volume très important d’investissements privés. La Commission estime que les investissements privés dans des activités gazières et nucléaires ont un rôle à jouer dans la transition ». Décrites comme « conformes aux objectifs climatiques et environnementaux de l’UE », ces énergies de transition ont ainsi pour but de « délaisser plus rapidement des activités plus polluantes, telles que les centrales à charbon ».

« Nous devons utiliser tous les outils à notre disposition, car nous avons moins de 30 ans pour y parvenir », a déclaré Mairead McGuinness, commissaire européenne aux services financiers, lors d’une conférence de presse à Bruxelles, précisant que « le projet présenté aujourd’hui n’est pas une fin en soi mais un moyen d’atteindre un but : un avenir à faible émission carbone, alimenté par des énergies renouvelables ». Les 2 énergies y sont soumises à « des limites claires et des périodes d’adaptation progressive ».

 

100% de gaz renouvelable et bas carbone à l’horizon 2035

Concernant le nucléaire, si l’acte délégué reconnaît les technologies avancées de type « Génération IV », aux déchets réduits, pour encourager la recherche et l’innovation, les nouveaux projets de centrales nucléaires de type « Génération III+ », en revanche, ne pourront bénéficier de la taxonomie que jusqu’en 2045, et les modifications et mises à niveau des installations nucléaires existantes jusqu’en 2040 (dates respectives de délivrance des permis de construire).

Concernant les projets de centrales gaz (production d’électricité, production de cogénération à haut rendement à partir de combustibles gazeux fossiles, ou production de chaleur ou de froid à partir de combustibles gazeux fossiles dans un système de chauffage et de refroidissement urbain efficace), la Commission européenne prévoit une période de transition pour les projets obtenant leur permis de construire avant le 31 décembre 2030. Sont désormais finançables les installations pour lesquelles les émissions du cycle de vie sont inférieures à 100 gCO2e/kWh et les émissions directes inférieures à 270gCO2e/kWh, si elles remplacent des énergies plus polluantes comme le charbon.

De plus, si les engagements d’intégrer 30% puis 50% de gaz renouvelables et bas carbone aux échéances de 2026 et 2030 pour les centrales de production d’électricité alimentées au gaz ne figurent plus dans cette version du texte, l’objectif du « 100% gaz renouvelable et bas carbone » à l’horizon 2035 est quant à lui maintenu.

 

Vers davantage de transparence pour les entreprises

Dans un souci de transparence, la Commission européenne a également modifié les obligations d’information liées aux activités de gaz et d’énergie nucléaire des entreprises.
Ainsi, les grandes sociétés non financières et financières cotées en bourse seront tenues de déclarer la proportion de leurs activités liées à ces deux énergies, afin de permettre aux investisseurs une visibilité sur le sujet.

 

Une entrée en vigueur en 2023 ?

Si le calendrier législatif prévoit une entrée en vigueur de cet acte complémentaire au 1er janvier 2023, il doit encore être validé par a minima 20 États-membres représentant au moins 65% de la population de l’Union européenne. Si ces chiffres devraient être atteints sans peine, les tensions n’en restent pas moins vives au sein des États-membres, dont certains, comme l’Autriche, ont annoncé leur intention d’engager une procédure devant la Cour de justice de l’Union européenne si cette taxonomie verte entrait en vigueur. Quant aux ONG, elles appellent également le Parlement et le Conseil européens à rejeter la proposition. De quoi bousculer, peut-être, le calendrier d’une taxonomie déjà controversée.